Deux nouvelles chroniques de « Personne Ne Le Fera Pour Nous » à lire respectivement sur les sites ROCK MY DAYS:
« Paradoxes et tiraillements, on peut regretter l’anonymat relatif et disserter à loisir sur le statut de Mendelson, rock social à l’intégrité jamais mise en défaut, méconnus hérauts d’un prolétariat de banlieue, chantres d’une condition humaine sombre et désabusée peut-être, bâtisseurs de chansons-cathédrales et de chansons-ovnis, de monumentales et terrifiantes récitations (auto- ?) biographiques (”1983 (Barbara)“) sur fond d’un rock libre et fier d’audaces. Se plaindre de l’absence de considérations mais se réjouir (légitimement et discrètement) que cette musique ne trouve pas grâce à un plus grand nombre, effrayante perspective de divulgation large d’un univers glacé, angoissant (”Le Sens Commun” en réminiscence d’un premier album coup de poing) et claustrophobe à sa manière… Les désirs d’ouverture (”Personne Ne Le Fera Pour Nous #2” presque vive et entraînante, “Sans Moi” à deux pas de se fondre dans un registre chanson française…) n’y sont que leurres plaisants, l’essence de Mendelson est radicale (”J’aime Pas Les Gens” féroce et noisy, “Dans Tes Rêves” décharnée), foisonnante au point qu’il faille double album pour tenter de la circonscrire. Et c’est encore trop peu, constat d’impuissance généralisé à délimiter l’ampleur de l’œuvre… essentielle, une nouvelle fois. »
et MILLEFEUILLE:
« Tout le monde rigole, tout le monde rigole » clamait avec ironie Pascal Bouaziz sur le précédent album de Mendelson, Seuls Au Sommet. Le groupe y était d’ailleurs tellement si seul qu’il n’aura même pas réussi à trouver une structure motivée pour sortir le malheureusement bien nommé Personne Ne Le Fera Pour Nous. On se passera du commentaire de rigueur sur l’ineptie de l’industrie musicale qui se permet de snober un groupe aussi précieux, mais on ne manquera pas de souligner qu’à l’heure où Radiohead clame haut et fort son originalité en annonçant In Rainbows en sortie « auto-gérée », Mendelson ne se paye pas le luxe de les imiter. Car il s’agit bel et bien d’une nécessité. Bref, pas de quoi s’exercer les zygomatiques…
Quel que soit l’avis que l’on puisse avoir sur ce double album (quitte à prendre des risques, autant aller jusqu’au bout), on ne pourra donc que s’incliner devant le courage de celui dont le statut de pur génie des mots s’est confirmé disque après disque, devant son entêtement justifié à ne pas lâcher prise, à vouloir continuer d’y croire. « J’ai toujours su qu’on y arriverait avec le groupe », affirmait-il d’ailleurs avec un propos frisant donc l’ironie sur Ca N’est Plus La Peine.
C’est d’ailleurs à ce morceau que Scanner nous fait penser, puisqu’il évoque également une rupture, mais cette fois-ci sans amertume, ni ironie, ni vachardise. On tient donc là la plus belle chanson d’amour que Mendelson ait pu produire à ce jour, sur deux accords berçants qu’une distortion furtive viendra à peine troubler. « Comment tu te sens ? Moi ca ne va pas si mal » : les retrouvailles démarrent d’un très bon pied avec ce petit chef-d’oeuvre qui va bien plus loin qu’évoquer une simple peine de coeur…
Mais il ne faudra pas pour autant croire que Mendelson s’est ramolli, l’inénarrable J’Aime Pas Les Gens se chargeant de remettre les pendules à l’heure. Seul Pascal Bouaziz pouvait se sortir avec brio d’une simple litanie de « J’aime pas… », avec son habituel humour citron. Beaucoup plus basées sur la répétition et les reprises, les paroles semblent avoir pris un nouveau tournant bien loin de l’épique Les Petits Frères Des Pauvres, comme si leur auteur avait décidé de moins amuser la galerie, allant même jusqu’à se faire très inquiétant sur un Le Sens Commun extrêmement glacial.
Epaulé par ses fidèles musiciens (parmi lesquels on retrouve Quentin Rollet et Charlie O.), Bouaziz aura beau se lancer avec décontraction dans un registre plutôt pop (l’ultra-efficace Personne Ne Le Fera Pour Nous #2, l’ensoleillé Une Chambre d’Hôtel) qu’il ne trompera personne : à l’image du format double disque, le contenu est assez exigeant, avec plusieurs titres longs (deux juste en dessous des dix minutes, deux autres qui les dépassent) et très riches, sans user d’artifices fallacieux, avançant parfois presque nu. Sans jamais tricher.
Le premier disque (quelque peu supérieur au second) se clôture d’ailleurs sur un 1983 tout simplement exceptionnel, utilisant le prisme d’une amourette d’enfance pour décrire le microcosme d’une cité anonyme des années 80. Ce qu’une chanson comme Par Chez Nous avait esquissé, 1983 le pousse à son paroxysme et on tient sans conteste le morceau le plus poignant jamais écrit par Pascal Bouaziz.
Ceux qui suivent encore Mendelson savent bien à quoi s’en tenir et on finira même par regretter de commencer à dompter ce contenu un peu lourd a digérer au premier abord, même si il y a tant de détails qu’on pourra y passer des mois sans perdre une once d’intéret. Qu’importe donc si certains trouveront que Personne Ne Le Fera Pour Nous se perd un peu en route par sa longueur. On ne pourra que se féliciter de la persévérance du groupe français le plus attachant et pertinent en activité. Celle-ci l’aura ainsi pousser à sortir sa production la plus aboutie à ce jour. Et la meilleure également.